La construction de la boutique Louis Vuitton d’Omotesando, haute
de 30 m, est une ossature tridimensionnelle, formée d’une accumu-
lation de six boîtes, qui respecte les normes antisismiques régle-
mentaires au Japon. Ce projet marque un tournant dans la concep-
tion des boutiques du célèbre malletier. En effet, outre un travail
là encore très important sur la façade, il intègre tous les aspects
visuels d’un point de vente, de sa devanture à son intérieur en pas-
sant par sa structure même. Pour organiser l’espace, l’architecte
japonais Jun Aoki a joué sur la proportion et l’empilement faus-
sement aléatoire de blocs évidés s’apparentant à des malles, de
tailles, de textures et de teintes différentes.
Ces blocs sont un hommage à la pièce maîtresse qui a fait naître
Louis Vuitton. Dans les années 1880, le fondateur de la maison
de luxe inventait la malle plate, plus facilement empilable que les
malles fabriquées à l’époque, qui présentaient un couvercle bombé,
moins pratique. À l’intérieur, l’espace crée une vue continue entre
les huit parallélépipèdes qui le composent pour ceux qui y déambu-
lent et opte pour une grande fluidité de circulation. Ouvert depuis
le 1er septembre 2002, le magasin d’Omotesando éveille les sens. La
structure réussit à supprimer la notion classique d’étages lorsque
le visiteur progresse dans le bâtiment enveloppé d’un voile de gaze,
qui laisse entrevoir son luxe de l’extérieur. L’intérieur s’apparente
à un labyrinthe sensuel en 3D et le visiteur est plongé dans l’uni-
vers du voyage, parmi une collection de malles et de valises, héri-
tage de la société.
Jun Aoki, qui a pensé les boutiques de Sakaemachi à Nagoya (1999)
et de Ginza à Tokyo (2000), est familier des concepts Louis Vuitton.
Architecte de la nouvelle vague des années 1980, il commence sa
carrière chez Arata Isozaki, dont il développe le modèle équilibré
dans la continuité du travail de Le Corbusier, en focalisant son
attention sur les motifs géométriques et les formes cubiques. Jun
Aoki associe dans ses projets les concepts issus de la technologie
des constructions occidentales à l’esthétique japonaise. Sa mar-
que de fabrique est l‘exaltation de la notion d’espace, grâce à des
formes abstraites mais riches de sens, notamment par l’évocation
de matières. Son agence créée en 1991, Jun Aoki & Associates, est
à l’origine de nombreux édifices, parmi lesquels la H House, la O
House, la piscine de Yusuikan, le musée du lagon de Fukushima,
le musée d’art d’Aomori, ou encore le complexe commercial « Plume
d’oiseau », dans le quartier tokyoïte de Ginza. Il a aussi conçu les
façades du flagship-store Louis Vuitton de New York en 2001.
PAGE DE GAUCHE, structure du flagship-store Louis Vuitton d’Omotesando à Tokyo.
Le concept d’architecture modulaire est dessiné en volume.
CI-CONTRE, lors de l’exposition tokyoïte présentant des projets architecturaux menés par
Louis Vuitton, la maquette de l’espace d’Omotesando dévoile une structure complexe pensée
comme un empilement de malles.